À l’occasion du Salon de l’Immobilier Bas Carbone à Paris, les Établissements Publics d’Aménagement Euroméditerranée à Marseille, Bordeaux Euratlantique et La Guyane étaient représentés lors d’une table ronde « Regards croisés » autour des réponses aux enjeux climatiques auxquels les grandes villes françaises font face. Reportage vidéo.
Canicules, inondations, vents violents, les villes françaises sont de plus en plus confrontées au changement climatique. Des villes conçues il y a plusieurs décennies et parfois inadaptées aux intempéries qu’elles devront affronter d’ici 2050. Pour faire face aux défis climatiques, les Établissements Publics d’Aménagement travaillent dès à présent à des projets adaptés à ces enjeux et conçus pour durer.

Chaque année, le Salon de l’Immobilier Bas Carbone (SIBCA) à Paris est l’occasion pour
les représentants de ces structures de partager les pratiques de leurs territoires.

Un échange constructif pour chacun : « Ça permet de montrer qu’il y a déjà des spécificités climatiques et territoriales dans chaque territoire d’intervention des établissements, mais en même temps des problématiques qui sont très communes pour traiter cette question du réchauffement climatique, de l’adaptation des territoires au changement et cette capacité à créer le bien-être pour les habitants. » commente Aurélie Cousi, Directrice générale d’Euroméditerranée.

Avec le changement climatique, les villes sont vouées à se transformer, mais à quoi ressembleront les territoires de demain ? Quels sont les freins que les EPA rencontrent ? Analyse.
Marseille, un climat méditerranéen de plus en plus chaud.
37 degrés le 31 juillet, 36 le 1ᵉʳ aout et fréquemment 35°C tout au long de l’été, la période estivale 2025 a encore une fois été chaude à Marseille. Des températures de plus en plus élevées et de plus en plus fréquentes qui deviennent parfois insoutenables en plein centre-ville avec parfois des températures ressenties qui peuvent être proches des 45°C.
Un climat méditerranéen chaud mais qui peut tout de même souvent profiter du vent.
Une composante sur laquelle Euroméditerranée souhaite s’appuyer pour la conception des projets afin d’atténuer les effets de la chaleur : « Les spécificités du climat méditerranéen, c’est évidemment le soleil, mais aussi le vent. C’est sur ce point que nous allons nous concentrer. L’enjeu, c’est de comprendre comment créer, avec ces éléments, des espaces publics qui protègent des effets les plus critiques de la canicule et du vent dominant. Et en même temps, comment les utiliser pour apporter un confort climatique aux habitants, aussi bien dans les logements que dans l’espace public. » explique Aurélie Cousi.

Des solutions pour rendre la ville plus vivable durant les périodes de fortes chaleurs et qui peuvent permettre de réduire l’utilisation de solutions rafraichissantes énergivores et polluantes comme la climatisation : « On voit bien que le réchauffement climatique impacte très fortement le confort des habitants en été avec les canicules. Plus on apporte des solutions qui sont passives, moins on a besoin d’apporter des solutions actives en complément. Donc ça va permettre d’éviter d’avoir des climatisations qui ne soient pas vertueuses, massifiées », continue la Directrice générale d’Euroméditerranée.
Le vent peut être considéré comme un levier à activer pour améliorer le bioclimatisme dans les projets d’aménagement en laissant l’air naturel rafraichir la ville mais il est aussi nécessaire de se protéger de la contrainte des vents trop violents : « Le vent a un impact très fort sur le confort. Il faut être en capacité à la fois de se protéger quand les vents dominants sont trop forts et en même temps d’utiliser la brise marine qui permet de rafraîchir très naturellement les espaces publics et aussi les logements. On travaille sur des logements traversants pour pouvoir utiliser justement cet effet naturel de ventilation pour apporter ce confort. » conclut Aurélie Cousi.
Bordeaux, la problématique de l’eau

650 kilomètres plus à l’ouest, l’Établissement Public d’Aménagement de Bordeaux Euratlantique pense ses espaces publics afin de pouvoir faire face aux crues. Avec la montée des eaux, l’aménageur imagine une nouvelle vision de la ville mieux préparée à retenir les eaux : « L’enjeu pour nous, c’est de retrouver les esteys, ces fameux ruisseaux qui retournent à la Garonne. Bordeaux est traversée par la Garonne. On est fortement impactés par l’eau, on travaille sur les inondations avec résilience et on s’est dit, plutôt que de lutter contre l’eau, de résister à l’eau, on va s’adapter exactement comme on s’adapte au changement climatique. » explique Valérie Lasek, Directrice générale de l’EPA Bordeaux Euratlantique.
Une ville de Bordeaux qui s’inspire de ce qui est fait ailleurs : « À Marseille, on a regardé un peu comment l’EPA a aménagé le parc du ruisseau des Aygalades pour pouvoir aménager le parc Eiffel et gérer le risque d’inondation en rive droite et faire de ce parc aussi un ouvrage hydraulique, pas simplement défensif, mais qui accueille l’eau et qui la laisse repartir. » continue Valérie Lasek.
Un aménagement essentiel à l’avenir avec la montée des eaux : « Si on ne fait rien, effectivement, on a des gens qui auront les pieds dans l’eau. C’est une certitude puisque le niveau de l’eau va monter et la Garonne monte avec le niveau de la mer. Et plutôt que de le subir, on va créer effectivement des réservoirs de crue. On va retravailler les esteys, ces fameux ruisseaux, pour pouvoir dégager les eaux à l’issue des crues pour pouvoir revenir à la Garonne », déclare-t-elle.

En plus de regarder vers Marseille, l’EPA Bordeaux Euratlantique s’inspire des villes plus au Sud, italiennes et espagnoles, pour imaginer, d’ores et déjà, les défis auxquels sera confrontée la métropole bordelaise d’ici quelques décennies : « On travaille, par exemple, à Bègles sur un jumeau climatique. La ville de Bègles a déjà son jumeau aujourd’hui avec ses spécificités architecturales et son parti pris d’aménagements. On va aller copier, s’inspirer, effectivement, de ce qui existe déjà pour pouvoir l’adapter au territoire en devenir, celui qui sera issu de la transformation urbaine. » explique-t-elle.
Un travail collaboratif entre les différents territoires qui leur permet de progresser plus rapidement dans la réalisation des aménagements : « En se partageant les différents leviers, on va plus vite. Souvent, on dit que tout seul, on va plus vite et ensemble, on va plus loin. Là, non seulement ensemble, on va aller plus loin, mais on va aller plus vite aussi », conclut Valérie Lasek.
La Guyane, un enjeu climatique et social

Près de 6 700 km plus à l’est, en Amérique du Sud, la Guyane abrite 313 000 habitants sur une superficie presque équivalente à la taille de la région Nouvelle-Aquitaine, Un territoire vaste, différent mais avec des problématiques similaires « En Guyane, nous sommes sur un territoire essentiellement vierge, composé à 95 % de forêts amazoniennes, mais avec des enjeux démographiques très forts puisque la population a triplé en 30 ans », décrit Denis Girou, Directeur général de l’EPA Guyane.
La Guyane fait face à une double problématique : le réchauffement climatique ajouté à des enjeux démographiques : « Il y a un enjeu de quantité de logements, mais il y a aussi un enjeu de qualité et de coût, puisque la moitié de la population est en dessous du seuil de pauvreté. » constate Denis Girou.
En plus de cette problématique démographique, la Guyane fait également face au risque de montée des eaux : « Concernant les effets du changement climatique, il y a des effets tout à fait importants sur la montée des eaux, et la conjonction de la montée de l’océan avec les débits des fleuves font que les risques liés aux inondations et la maîtrise de l’eau en général, sont déjà importants en Guyane au départ. Il pleut quatre mètres en moyenne chez nous tous les ans, donc ces risques vont prendre une importance encore plus cruciale à l’avenir. » explique Denis Girou.

Afin de tenter d’empêcher la montée des eaux, l’EPA de Guyane aménage le territoire en utilisant des techniques modernes mais également traditionnelles : « Concrètement, comment on fait ? Il y a plusieurs façons. Il y a des façons techniques en termes d’aménagement, avec des bassins de rétention, des bassins de compensation de l’hydraulique. Il y a des solutions ensuite architecturales qui, pour certaines, sont des solutions traditionnelles, des maisons sur pilotis par exemple », précise Denis Girou, Directeur général de l’EPA Guyane.
En conclusion :
Avec le changement climatique, d’ici 2050, les températures mondiales pourraient augmenter d’environ +2,0 °C par rapport à l’ère préindustrielle, et le niveau moyen des mers s’élever d’environ 20 à 25 cm, selon les estimations intermédiaires du GIEC. Des prévisions inquiétantes qui poussent les villes à se transformer. À Marseille, la température moyenne annuelle pourrait augmenter de 2 à 2,5 °C d’ici 2050 par rapport à la période 1976-2005, selon les projections de Météo-France.
Une estimation qui pousse les territoires à se réinventer. A Marseille, Euroméditerranée invente un nouveau modèle de Ville Durable Méditerranéenne en s’appuyant sur les caractéristiques locales pour améliorer la qualité bioclimatique des projets et contourner les contraintes, tout en ouvrant le champ de l’expérimentation. s’appuyant sur le climat venteux de la Méditerranée.

À Bordeaux ou en Guyane, les problématiques sont différentes mais bien présentes. En
échangeant sur la conception des villes de demain, les établissements publics d’aménagement construisent des territoires pour l’avenir en améliorant le confort de vie de leurs habitants face au dérèglement climatique.
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