Après sept années de travaux minutieux, l'amphithéâtre gallo-romain de Saintes retrouve enfin sa splendeur d'antan. Ce joyau architectural du premier siècle de notre ère, que les habitants surnomment affectueusement "Les arènes", vient de bénéficier d'une restauration majeure de 5,4 millions d'euros - la première depuis près d'un siècle.
L’urgence était réelle : les deux portes emblématiques du monument menaçaient de s’écrouler. “Les portes étaient sur le point de s’effondrer. Il y avait péril et urgence”, rappelle Joël Terrien, adjoint au maire chargé des grands projets. La Direction régionale des affaires culturelles de Nouvelle-Aquitaine, qui a piloté ce chantier d’exception, confirme que cet amphithéâtre demeure pourtant “l’un des mieux préservés de la Gaule”.
Deux portes, deux destins
La restauration s’est déroulée en deux phases distinctes. Entre 2022 et 2024, la majestueuse porte des Vivants, baptisée “Sanavivaria” et située à l’est, a retrouvé sa blancheur immaculée. Cette entrée imposante permettait jadis d’offrir un triomphe aux vainqueurs des combats.
À l’exact opposé, la porte des Morts – “libitinensis” de son nom antique – vient d’être achevée et sera inaugurée en avril prochain. Plus discrète, elle servait à évacuer les dépouilles après les affrontements dans l’arène. Ensemble, ces deux ouvertures racontent l’histoire dramatique des jeux antiques qui se déroulaient devant jusqu’à 15 000 spectateurs, soit la totalité de la population de la cité gallo-romaine.
Un chantier respectueux de la biodiversité
Niché au cœur d’un vallon arboré riche en biodiversité, l’amphithéâtre a nécessité des précautions particulières. Des espèces protégées comme le papillon azuré du serpolet, le faucon crécerelle ou encore le crapaud alyte accoucheur ont bénéficié d’aménagements spécifiques. “Nous avons même construit des mares et des pierrées pour déplacer le crapaud alyte accoucheur”, précise Joël Terrien.
Les artisans ont également dû concocter un mortier à base de chaux pour s’approcher de la recette originelle sans dénaturer l’ouvrage. Des moellons et des renforts métalliques discrets ont été intégrés pour consolider la structure. “Un travail d’orfèvre”, résume l’élu local, satisfait du résultat : “Il est désormais possible d’en faire le tour complet, ce qui était impossible avant”.

Une dernière phase en 2026
Si les deux portes historiques ont retrouvé leur éclat, le chantier n’est pas terminé. Une troisième phase débutera en 2026 avec des travaux d’assainissement cruciaux. L’objectif : évacuer les eaux pluviales qui transitent par l’amphithéâtre chaque hiver.
“Un égout antique passe en plein milieu de l’arena. Des caniveaux antiques ont même été retrouvés récemment sur les pourtours”, explique Joël Terrien. Un système de drainage moderne, associé à une pompe de relevage et connecté aux installations antiques, devrait permettre de “préserver l’édifice” des inondations hivernales.
Un patrimoine mieux valorisé
Classé aux Monuments historiques dès 1840, l’amphithéâtre attire aujourd’hui 50 000 visiteurs par an. La Ville de Saintes, propriétaire du monument, entend désormais mieux valoriser cet héritage exceptionnel et le connecter davantage à ses autres sites patrimoniaux.
Cette renaissance s’inscrit dans une démarche plus large de préservation du patrimoine gallo-romain saintais. Avec le soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine, qui a contribué à hauteur de 170 000 euros sur l’ensemble du projet, Saintes redonne vie à son identité historique millénaire.
L’amphithéâtre de Saintes prouve qu’avec de la patience et des moyens adaptés, les témoins de notre histoire peuvent traverser les siècles et continuer à émouvoir les générations futures.
Réagissez à cet article