Le port de Marseille-Fos a manutentionné 70,5 Mt de fret en 2024 en baisse de 2% comparé à l’an passé. Malgré les tensions en Méditerranée, notamment les difficultés persistantes de transit via Suez et la dégradation de la relation franco algérienne, les trafics sont demeurés dynamiques en 2024. Le trafic passagers accuse, pour sa part, un repli de 4% notamment dans le segment des croisières. Reportage vidéo avec son président Christophe Castaner.
2024 a été marquée par l’accélération des bouleversements géopolitiques à l’international et par les conséquences de la dissolution de l’Assemblée nationale dans l’Hexagone. Le port de Marseille-Fos, principale porte des échanges commerciaux en France, avec Le Havre et Dunkerque, a vu ses trafics reculer de 2% en 2024 s’établissant à 70,5 MT.
Un recul imputable aux difficultés de la sidérurgie avec les deux hauts fourneaux d’ArcelorMittal quasiment arrêtés et le recul inéluctable depuis des années des imports de brut. Le trafic conteneurs a augmenté de 9% à 1,45 M Evp, soutenu par la hausse des flux en transbordement, stimulée par le détournement des lignes maritimes vers le Cap de Bonne Espérance, le canal de Suez étant toujours aux mains des Houtis, malgré l’accord Israélo-palestinien.
Résultat : Le port phocéen a bénéficié de 65 000 Evp supplémentaires. Par ailleurs, les volumes import et export ont progressé avec une croissance de 53 500 conteneurs Evp. Une augmentation particulièrement marquée sur des axes stratégiques tels que la Chine (+ 12 %) et en Méditerranée : Algérie (+12 %), Turquie (+13 %), Égypte (+25 %).
Algérie-France, hausse des flux conteneurisés de 12%
Depuis la prise de position d’Emmanuel Macron en faveur du Maroc sur le sujet du Sahara Occidental, les relations entre la France et l’Algérie historiquement complexes sont devenues extrêmement tendues. Un peu plus tôt dans l’année, en mai 2024, le port et la ville de Marseille avaient conduit ensemble une mission sur place pour resserrer leurs liens. « Nous surveillons ce sujet comme le lait sur le feu », souligne Hervé Martel, président du directoire du port de Marseille-Fos.
Malgré les vives tensions, les échanges sont restés dynamiques en 2024 mais la situation pourrait se dégrader dans les mois à venir, l’Algérie demandant désormais « d’aller sourcer les produits ailleurs qu’en France ».
L’ancien ministre Christophe Castaner, président du Conseil de surveillance du port se veut consensuel avant tout :
« La relation entre la France et l’Algérie est politique, alors qu’ici, à Marseille, nous avons des liens entre les femmes et les hommes. Dans ces moments de tension, nous avons connu une hausse du fret conteneurisé de 12%, l’année dernière entre Marseille et l’Algérie. Nous devons trouver notre place dans ce débat politique sans y participer et faire en sorte d’améliorer l’accueil des voyageurs. La logique de corridor est importante. Je suis attaché à contribuer à renforcer ce lien sans interférer dans les relations diplomatiques », ajoute Christophe Castaner.
Les grandes manœuvres des ferries et cargo-mixtes en Méditerranée ont commencé avec l’annonce par Baléaria, le 20 janvier dernier, d’une quatrième ligne hebdomadaire au départ de l’Espagne vers l’Algérie. En France, le port de Sète séduit de plus en plus les compagnies maritimes Grandi Navi Veloci (Groupe MSC) qui dessert Tanger et Nador au Maroc et également Corsica Linea qui touche l’Algérie depuis 2023 depuis le port héraultais.
A Marseille, La Méridionale devrait développer une ligne supplémentaire sur le Maroc au départ de Marseille en 2025. « La priorité est donné à ceux qui sont déjà présents. Le terminal du Cap Janet est contraint », tranche Hervé Martel. « Si un armateur choisit un autre port que Marseille, à nous de rendre notre port plus attractif encore. Nous avons un niveau d’exigence, notamment sur le pavillon et il faut faire en sorte qu’il soit partout le même sinon il y a une concurrence déloyale sur le territoire. Nous ne maitrisons pas l’ouverture d’une ligne, c‘est une initiative privée et une décision publique avec l’Algérie ».
En novembre dernier, la compagnie privée algérienne Nouris Elbahr Ferries a lancé une ligne régulière hebdomadaire ropax entre la France (Marseille), l’Espagne et l’Algérie. Autre grand sujet de 2025 en Méditerranée, l’instauration de la zone à faible émission de soufre imposant aux compagnies de bruler du diesel, du HFO à 0,1% ou de recourir à des nettoyeurs de fumée ou des carburants alternatifs comme le GNL qui représente désormais 30% des escales de paquebots à Marseille.
Les compagnies de ferries seraient, dit-on prêtes, y compris Algérie Ferries à se brancher au courant de quai à Marseille, seuls les navires Tunisiens ne se seraient pas prêts en juin, date de l’entrée en vigueur du texte instaurant la zone SECA MED.
Ambitions méditerranéennes dans l’éolien off-shore
Le port de Marseille-Fos annonce 99 M€ d’investissements en 2025 dont 35 M€ pour le développement de la transition écologique, 32 M€ pour le développement des activités maritimes et l’aménagement des bassins et des terminaux et 32 M€ pour moderniser les infrastructures portuaires.
Le port a notamment prévu la poursuite de l’électrification des quais de la croisière et de la réparation navale. Parmi les grands chantiers parés à débuter, le développement de l’éolien flottant. Le projet baptisé DEOS pour développement de l’éolien offshore, va permettre la construction et la mise à disposition d’ici fin 2028 des aménagements nécessaires au déploiement industriel des champs en mer d’éoliennes flottantes. Un investissement de 600 M€ que le port compte bien rentabiliser.
« DEOS a pour objectif de se déployer en Méditerranée. C’est un projet d’assemblage des éoliennes en lien avec Port-La-Nouvelle. Il s‘agit d’avoir la capacité de construire des flotteurs, grands comme un terrain de foot. Un flotteur peut déplacer sur 1000 Km », a souligné Christophe Castaner qui compte bien faire rayonner cette nouvelle filière de production d’énergie verte au sud de l’Espagne jusqu’à la Sicile.
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