Dans le prolongement d’une année 2024 décevante en termes d’évolution des chiffres d’affaires (36 % des entreprises déclarant une baisse), les perspectives d’activité des TPE-PME régionales pour le 1er semestre 2025 demeurent globalement pessimistes, le manque de vigueur de l’activité étant considéré comme le 1er frein au développement. Voici les résultats de l’enquête de conjoncture semestrielle de la CCI AURA réalisée en janvier 2025.
Le contexte de crise politique, suscité par la censure du Gouvernement, a refroidi un climat des affaires déjà malmené. Près de 80 % des dirigeants disent ainsi ne pas être confiants dans la situation.
L’impact délétère de cette situation apparaît clairement dans les réponses des dirigeants portant sur l’investissement. Les perspectives pour le 1er semestre se dégradent encore, avec seulement 10 % des entreprises qui annoncent une hausse. Et les entreprises qui ont des projets d’extension de leur activité en 2025 pourraient les revoir du fait de la persistance de l’instabilité politique ou si le niveau d’activité restait insuffisant en début d’année.
Dans ce contexte, la situation de l’emploi s’est également dégradée en 2024. L’effectif salarié a été stable en 2024 pour 2/3 des TPE-PME répondantes. Mais pour les autres, celles qui ont réduit leur effectif (19 %) sont plus nombreuses que celles qui l’ont accru (15 %). Le solde devient ainsi négatif à – 4 alors qu’il s’établissait encore à + 2 en juillet.

Les difficultés de recrutement restent toutefois présentes même si elles sont en recul sensible. Pour le 1er semestre, des entreprises dont le segment d’activité reste dynamique prévoient de poursuivre leurs recrutements.
« Le recul du PIB de la France au 4e trimestre 2024 constitue une alerte sérieuse qu’il convient de prendre en compte.
La conjonction d’une concurrence internationale qui se durcit, d’un protectionnisme mondial qui s’intensifie et d’une situation politique nationale instable diminue la visibilité économique et pèse sur les investissements. Les carnets de commandes se réduisent et les trésoreries se tendent.
C’est ce qui ressort clairement des résultats de notre enquête TPE-PME avec, notamment, un niveau de confiance qui atteint un point bas.
Il est donc crucial de redonner des perspectives et une vision pour notre pays en prenant pleinement en compte le défi majeur de la compétitivité. Notre productivité, qui constituait auparavant un avantage déterminant, est, en effet, en baisse depuis plusieurs années alors que nos prélèvements obligatoires restent les plus élevés au monde.
Il s’agit d’une situation qui présente de forts risques de décrochage.
Nous appelons donc l’ensemble des dirigeants de notre pays à favoriser l’activité économique, à alléger les charges des entreprises et à simplifier l’environnement réglementaire. Il y va de notre avenir à court et moyen terme. » précise Philippe Guérand, le président de la CCIR Auvergne-Rhône-Alpes.

Plus d’un tiers des TPE-PME en recul de chiffre d’affaires
Le bilan annuel, en termes de variation du chiffre d’affaires, traduit bien la montée des difficultés économiques en 2024 : les TPE-PME se répartissent ainsi grosso modo en trois tiers, entre les progressions, la stabilité et les baisses.
Et il faut souligner que le contexte était encore à la hausse des prix de vente en 2024 (37 % des TPE-PME disaient augmenter leurs tarifs lors de l’enquête de juillet dernier).
Avec 36 %, c’est la situation d’un recul du chiffre d’affaires qui est la plus fréquente. 33 % des entreprises ayant bénéficié d’une progression, le solde « part en hausse » – « part en baisse » s’établit à – 3. Il était de + 11 pour l’année 2023.
Il faut remonter à 2012-2013 (hors période Covid) pour retrouver ce niveau d’entreprises en recul de CA.
On note aussi que 14 % des TPE-PME disent avoir subi un recul de chiffre d’affaires d’au moins 10 %. La part atteint même 20 % dans l’industrie et le commerce de gros.
Le bilan annuel en termes de chiffre d’affaires s’est notamment dégradé pour les entreprises industrielles, avec un solde qui s’établit à – 15 alors qu’il était de + 18 en 2023. Le solde du commerce de gros et du transport logistique est aussi nettement négatif, ce qui confirme le net ralentissement industriel. Il s’est aussi encore dégradé dans le BTP, pour atteindre -15.
Dans ce contexte, on peut noter que les entreprises exportatrices présentent un solde à l’équilibre. Il était toutefois de + 17 l’année dernière.
Les activités du tertiaire supérieur, tirées notamment par le secteur du numérique, sont celles qui réalisent le bilan 2024 le plus favorable avec un solde à + 19.
Pour les activités tournées principalement vers les particuliers, le bilan 2024 est hétérogène. Il est défavorable dans l’hébergement-restauration avec un solde à – 12. Ce solde est en revanche légèrement positif dans le commerce de détail (+ 4), soit un niveau proche de celui de 2023 (+ 6).

Une activité morne en fin d’année
Le bilan des fêtes de fin d’année apparaît particulièrement mal orienté. Près de 80 % des TPE-PME ayant une activité impactée par la consommation liée aux fêtes disent ainsi avoir perçu une baisse de la consommation.
Pour ce bilan des fêtes, la situation apparaît plus défavorable dans le commerce de détail que pour l’hébergement-restauration.
Les entreprises qui ont perçu cette baisse de la consommation avancent les explications suivantes :
– la pression sur le pouvoir d’achat des ménages pour les 2/3 d’entre elles,
– un climat anxiogène dissuadant les consommateurs pour une nette majorité (57 %),
– et un changement de comportement des consommateurs (39 %).
En termes de marge, la situation la plus fréquente pour les TPE-PME régionales en 2024 a été la stabilité (près d’une entreprise sur deux). Mais celles qui ont enregistré une baisse sont plus nombreuses que celles qui enregistré une hausse (solde à – 13, alors qu’il était de – 18 en 2023).
14 % des entreprises disent être freinées par une rentabilité insuffisante. Et un tiers des entreprises en difficultés de trésorerie l’expliquent par un problème de marge sur leurs ventes.

Quelle est la situation de l’investissement ?
Au cours du 2e semestre 2024, 23 % des TPE-PME disent avoir renoncé en tout ou partie à des investissements prévus. La part était de 22 % en juillet dernier et de 19 % il y a un an.
Quant aux perspectives d’investissement pour le 1er semestre 2025, si les deux tiers des entreprises annoncent une stabilité, seulement 10 % prévoient une hausse, soit – 3 points en six mois. C’est le niveau le plus faible depuis 2018. Cette part est notamment en recul dans l’industrie. Le solde « part des entreprises en hausse » – « part des entreprises en baisse » recule encore pour s’établir à – 10.
Lors de l’enquête de janvier, les dirigeants ont été interrogés sur leurs projets d’extension de leur entreprise en 2025. Parmi les entreprises qui avaient des projets pour cette année, un tiers dit les avoir annulés ou repoussés. La situation est la plus fréquente pour les TPE, le commerce de détail, l’hébergement-restauration et le transport/logistique.
Celles qui ont toujours des projets d’extension de leur activité ont été interrogées sur les situations qui pourraient les remettre en question (avec une possibilité de deux choix).
Deux situations apparaissent au même niveau, citées par un tiers des répondants : l’instabilité politique en France et un niveau d’activité insuffisant en début d’année. Un peu plus de 10 % des répondants invoquent l’incertitude sur le régime des impôts et taxes ou le niveau des taux d’intérêt.
A noter que dans l’industrie et le BTP, l’instabilité politique arrive largement en tête des risques perçus. Pour les entreprises exportatrices, l’instabilité politique en France arrive aussi largement en tête, loin devant l’aggravation des tensions internationales.
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