La Ville et la Prud'homie de Palavas-les-Flots ont lancé le vendredi 6 juin la première phase du projet de conserverie artisanale, visant à développer de nouveaux débouchés pour les produits de la pêche locale. Reportage vidéo.
L’initiative, portée par Baptiste Canville, prud’homme major, s’inscrit dans une stratégie de diversification économique de la filière halieutique locale. “C’est un projet collectif”, explique-t-il. “La finalité est de faire déguster les conserves de poissons aux riverains, pour partager tout ce travail.”
Le projet prévoit la transformation en conserves des espèces pêchées sur le territoire prud’homal, qui s’étend de Frontignan à la frontière entre l’Hérault et le Gard sur 30 kilomètres de littoral.

Un positionnement unique sur le marché de l’anguille
Palavas-les-Flots revendique la plus importante pêche nationale d’anguille, une activité pratiquée dans les étangs selon des périodes d’ouverture et de fermeture strictement réglementées. « Nous sommes les premiers pêcheurs d’anguilles de France. C’est énorme ! », confirme Baptiste Canville. Cette spécialisation constitue l’un des axes stratégiques du projet de conserverie, permettant d’étaler la commercialisation sur l’ensemble de l’année.
Le concept répond à une problématique économique précise. « Dans des moments de pêche intense, cela permet aux pêcheurs de mettre leurs produits dans des conserves et non pas de les brader ou malheureusement de les jeter quand il y en a trop », explique Christian Jeanjean, Maire de Palavas-les-Flots.

Un modèle partenarial
Le développement du projet repose sur un écosystème d’acteurs locaux. La Ville de Palavas-les-Flots, le Centre d’Etude pour la Promotion des Activités Lagunaires et Maritime (CEPRALMAR), et le lycée de la mer Paul Bousquet participent à l’initiative.
« La Région Occitanie a accompagné ce projet avec des crédits, mais au-delà du financement, ce qui est important, c’est le projet lui-même, c’est la valorisation des produits de la pêche », souligne Sébastien Denaja, Conseiller régional d’Occitanie et Président du CEPRALMAR. Le financement provient de l’Union Européenne et de la Région Occitanie via le Fonds Européen pour les Affaires Maritimes, la Pêche et l’Aquaculture (FEAMPA).
L’élaboration des recettes a été confiée à Paul Courtaux, chef du restaurant Saint-Georges à Palavas, en collaboration avec Gérard Cabiron, Meilleur Ouvrier de France 2007, qui met à disposition son laboratoire et son expertise technique. Bruno Roche, professeur de cuisine au lycée Georges Frêche, complète l’équipe de développement produit.

Phase de test et étude de marché
Neuf recettes ont été développées, incluant des terrines d’anguilles et de muges fumés, des ragoûts d’anguilles et seiches, ainsi que diverses soupes et marinades. La dégustation du 6 juin sert de test produit, avec une enquête menée par les étudiants du BTS Maritime Pêche et Gestion de l’Environnement Marine du lycée Paul Bousquet de Sète.
Cette phase d’évaluation vise à recueillir les retours consommateurs sur le contenu et le packaging avant la commercialisation. Les données collectées orienteront les ajustements produits et la stratégie de lancement.

Enjeux de filière et souveraineté alimentaire
Pour Sébastien Denaja, cette initiative s’inscrit dans une stratégie plus large : « La pêche est une activité difficile parce qu’il y a beaucoup de contraintes, une réglementation très tatillonne. L’une des solutions d’avenir, c’est de mieux valoriser les produits, de mieux faire connaître les produits aux consommateurs. »
L’élu régional insiste sur l’importance économique du secteur : « Nous sommes la deuxième flotte de pêche française. Cela représente des milliers d’emplois directs et indirects. » Il évoque également les enjeux de souveraineté alimentaire : « Si l’on veut manger français, si l’on veut manger occitan, ici, nous avons du poisson frais tous les jours dans nos criées. »
Le Maire Christian Jeanjean rappelle l’évolution démographique de la profession : « En 1940, il y avait près de 350 familles de pêcheurs. À présent, il doit y avoir 45 familles à peu près. Mais nous souhaitons justement essayer de faire qu’il y en ait une cinquantaine ou une soixantaine ».

Calendrier de commercialisation
La phase d’industrialisation débutera après analyse des résultats de l’enquête consommateurs. « Nous avons organisé cette journée de dégustation pour que les Palavasiens puissent critiquer, goûter, donner leur avis. Et à l’issue, nous allons faire des petites modifications et les commercialiser », précise Baptiste Canville. La mise sur le marché est programmée pour la fin du deuxième semestre 2025.
Le projet s’inscrit dans une démarche de circuits courts. Pour le Maire, l’objectif dépasse le simple aspect économique : « C’est aussi la possibilité, un lien entre Palavas et beaucoup d’habitants en France, en Europe et ailleurs. »

Impact sur la filière locale
L’initiative pourrait créer de nouveaux revenus pour les 33 patrons pêcheurs de la prud’homie palavasienne, tout en développant une offre de produits transformés à forte valeur ajoutée. Le modèle pourrait également être répliqué par d’autres prud’homies du littoral méditerranéen. Sébastien Denaja confirme cette stratégie : « Il y a un projet du même type à Sète, il y en a un autre aussi à Gruissan. C’est une solution d’avenir pour nos pêcheurs, pour valoriser leurs produits. »
Baptiste Canville souligne l’enjeu touristique : « Nous avons un patrimoine environnemental monstrueux. A travers ces conserves, c’est aussi l’occasion de faire comprendre aux touristes que Palavas-les-Flots, ce n’est pas que du soleil, des parasols, de l’eau chaude, mais aussi de vraies valeurs, et des valeurs culinaires. »

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