Dans le cadre de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH) du 18 au 24 novembre, l’Apec et l’Agefiph publient une étude inédite « Révéler et faire reconnaître son handicap en entreprise ». Pour la première fois, cette enquête qualitative revient sur les enjeux liés à la révélation et la reconnaissance du handicap en entreprise chez les cadres, et pose avec acuité la question du changement de regard et de pratiques, en faveur d’un monde du travail plus inclusif.
Une crainte d’être freiné dans sa carrière
Entre la peur d’être stigmatisés et d’être freinés dans leurs carrières, les idées-reçues associées au handicap ou encore la culture de la performance inhérente à leur fonction, de nombreux cadres choisissent de dissimuler leur situation de handicap en particulier lorsque leur handicap est invisible.
12 % des actifs affectés par un handicap – ou ayant un problème de santé qui limite leurs activités au quotidien – occupent un emploi de cadre, soit 7% de la population cadre. Une part significative ne souhaite pas ou n’estime pas nécessaire de faire reconnaître leur handicap.
Ainsi, seuls 2 % d’entre eux déclarent disposer d’une reconnaissance administrative de leur handicap, contre 5 % pour l’ensemble des actifs.
« Je n’ai pas envie non plus que mon état de santé serve à me donner des missions moins intéressantes, en estimant que c’est pour mon bien » déclare un homme de 59 ans, qui travaille en grande entreprise, handicap non visible, sans RQTH.
« Reconnue Travailleur Handicapé en 2012, ma carrière s’est stoppée net. Je n’ai plus aucune proposition parce que je ne peux plus travailler à temps plein. » indique une Femme de 56 ans, en grande entreprise, handicap non visible, avec RQTH.
Ces craintes d’être considérés comme moins compétents renvoient à des situations vécues. Rappelons qu’une majorité des réclamations adressées au Défenseur des droits sont fondées sur le critère du handicap, et les saisines dans le domaine de l’emploi concernent en premier lieu l’évolution de carrière, devant l’accès à l’emploi.
Faire reconnaitre le handicap pour sécuriser le maintien en emploi
Même si la révélation et la reconnaissance du handicap, surtout lorsqu’il est invisible, est rarement spontanée, les cadres s’y résolvent lorsque la dégradation de leur état de santé devient trop difficile ou coûteuse à dissimuler, et que les aménagements de poste deviennent nécessaires.
Ces aménagements, réalisés en lien avec le service santé au travail, constituent un bénéfice clé de la démarche RQTH, qui agit comme un accélérateur pour une meilleure prise en charge.
Temps de travail thérapeutique, aménagement de la charge de travail, télétravail, etc., ces dispositions favorisent le maintien en emploi des collaborateurs et collaboratrices concernés et leur permettent de surmonter les doutes quant à leurs aptitudes à travailler, de préserver leur santé et leur bien-être au travail, en réduisant les efforts de surcompensation liés à la dissimulation du handicap, pouvant générer fatigue, stress, douleurs…
Un processus administratif méconnu et souvent éprouvant qu’il convient d’accompagner
De nombreux cadres ont malheureusement une connaissance approximative, voire une méconnaissance, de la RQTH et n’ont souvent pas conscience des droits qui y sont associés comme l’aménagement sur le plan organisationnel ou technique par exemple.
En outre, la révélation de sa situation à l’employeur ne va pas toujours de pair avec la démarche de reconnaissance, et inversement, l’obtention de celle-ci n’induit pas nécessairement la révélation du handicap à son entreprise.
L’acceptation du handicap constitue également une étape importante, en particulier pour les cadres dont le handicap est invisible et qui peuvent avoir du mal à s’identifier au statut de « travailleur handicapé ».
« Il est primordial de lutter contre les discriminations au travail liées au handicap. Aborder le sujet du handicap en entreprise pour faire tomber les tabous permet de créer un climat où chacun et chacune se sent libre de révéler son handicap sans crainte de stigmatisation. Aux côtés de l’Agefiph et de l’ensemble des acteurs de l’emploi, nous sommes pleinement mobilisés pour favoriser un plein-emploi inclusif, où les compétences de tous et toutes sont représentées. » souligne Gilles Gateau, directeur général de l’Apec.
« Le vécu des cadres en situation de handicap souligne l’importance de sécuriser leurs conditions de travail en mobilisant les aides et services existants, de lever les barrières des représentations en confortant le fait que la culture de la performance peut aller de pair avec des conditions de travail optimisée. Il convient aussi de rappeler que les personnes en situation de handicap, de par leur vécu, sont tout autant porteuses elles -mêmes de performance » déclare Didier Eyssartier, directeur général de l’Agefiph.
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