Dans un contexte de tensions croissantes sur la ressource en eau, Ecomnews est allé à la rencontre d’Olivier Sarlat, directeur de la Région Sud des activités Eau de Veolia et président du pôle de compétitivité Aqua-Valley. Il revient sur les enjeux majeurs de la gestion de l'eau dans le sud de la France et présente les solutions envisagées pour y faire face. Interview vidéo exclusif !
Veolia dessert aujourd’hui un territoire couvrant six départements du sud de la France : les Pyrénées-Orientales, l’Aude, l’Hérault, le Gard, la Lozère et l’Aveyron. L’entreprise emploie environ 830 collaborateurs, dont une quarantaine d’alternants, et assure la distribution d’eau à 1,2 million de personnes ainsi que les services d’assainissement à près d’un million d’habitants.
« Nous réalisons des services qui sont essentiels. Je pense que tout le monde s’en est bien rendu compte au moment du COVID où les rues étaient vides, mais malgré tout, les collaborateurs de Veolia, que ce soit au niveau des services de l’eau, des services de l’assainissement, ont continué à assurer ces services-là », souligne Olivier Sarlat.
Le changement climatique : un double défi
« L’eau, c’est un véritable marqueur du changement climatique par ses manques et par ses excès », affirme le directeur régional. Ce constat se traduit par des projections alarmantes pour la région : une diminution des débits des cours d’eau et des rechargements des nappes souterraines de l’ordre de 20 à 40% dans les années à venir.
Olivier Sarlat illustre cette réalité par l’exemple des Pyrénées-Orientales : « Pendant quasiment trois ans, c’est moins de 200 millimètres d’eau qui tombait et donc un stress hydrique extrêmement important qui était quasiment comparable à celui d’une région semi-aride dans le monde. »
Mais le changement climatique ne se manifeste pas uniquement par des sécheresses. « De la même façon, si vous prenez les événements que l’on a pu connaître sur la vallée de la Roya il y a quelques années, l’eau peut aussi être un élément destructeur », rappelle-t-il.
L’eau, ressource stratégique pour les territoires
« L’eau, c’est un véritable levier d’attractivité de développement des territoires. Sans eau, vous n’avez pas d’agriculture, sans eau, vous n’avez pas d’industrie, sans eau, vous n’avez pas de tourisme et sans eau, vous ne fixez pas vos populations », explique Olivier Sarlat.
Face à ces enjeux, Veolia propose une approche triple : sensibiliser les populations, adapter les services aux problématiques climatiques, et développer des solutions décarbonées pour contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Des solutions concrètes face à la raréfaction de l’eau
Pour répondre aux défis actuels, plusieurs pistes sont explorées :
1. La réduction des fuites
« Il faut savoir qu’en France, aujourd’hui, 20% de l’eau qui est mise en distribution est perdue par les fuites », alerte Olivier Sarlat. Pour y remédier, Veolia a développé diverses technologies : corrélation acoustique, recherche de fuites par satellite, et même recours à des brigades canines.
2. Le renouvellement des infrastructures
Le taux moyen de renouvellement des réseaux en France n’est que de 0,6%, ce qui équivaut à considérer que les canalisations ont une durée de vie supérieure à 100 ans. « Il faut absolument que les collectivités arrivent à entrer dans un rythme de renouvellement beaucoup plus régulier », insiste le directeur.
3. La diversification des ressources
La réutilisation des eaux usées traitées constitue une solution prometteuse. « Cette eau peut avoir une seconde vie, on peut la régénérer », explique Olivier Sarlat. Les eaux réutilisées peuvent servir à l’agriculture, au nettoyage des voiries, à l’arrosage des golfs ou des espaces verts.
Le dessalement de l’eau de mer pourrait également devenir une option à considérer, notamment pour les communes littorales, bien que cette solution présente encore des défis économiques et environnementaux.
Le prix de l’eau : un enjeu économique et social
Le prix moyen de l’eau en France est d’environ 4,40 € le mètre cube. « Trouvez-moi une ressource qui soit aussi vitale, qui soit aussi peu chère », interroge Olivier Sarlat, tout en rappelant que ce coût couvre à la fois la production et la distribution d’eau potable ainsi que la collecte et le traitement des eaux usées.
Le budget eau représente moins de 1% des dépenses d’un ménage moyen français, contre 3% pour les télécommunications et 5% pour l’énergie (hors carburant). Toutefois, conscient des difficultés financières que rencontrent certains ménages, Veolia met en œuvre diverses solutions d’accompagnement.
Quant à l’évolution future du prix de l’eau, elle semble inévitable face aux investissements nécessaires. « Aujourd’hui, le monde de l’eau, c’est environ 23 milliards d’euros qui sont générés chaque année en France. Et il faudrait injecter 13 milliards de plus chaque année pour mettre nos réseaux à niveau et faire évoluer nos installations », précise Olivier Sarlat. Le défi consistera à rendre cette augmentation « la plus acceptable possible », particulièrement pour les personnes en situation de précarité.
Face au changement climatique, l’eau s’affirme comme un enjeu stratégique majeur pour les territoires du sud de la France. Les solutions techniques existent, mais leur mise en œuvre nécessitera des investissements considérables et une vision à long terme.