La Communauté de communes De Cèze Cévennes a misé sur les journées immersives pour valoriser ses producteurs locaux et rapprocher consommateurs et agriculteurs. Sur ce territoire cévenol marqué par une agriculture de niche, élus et exploitants partagent une même ambition : faire vivre le terroir. Reportage vidéo en immersion auprès des agriculteurs. 
                      Sur les contreforts des Cévennes, entre vallées escarpées et terrains granitiques, l’agriculture trace sa route. Ici, pas de grandes plaines mécanisées, mais une mosaïque de productions spécialisées portées par des passionnés. Vignes, oliviers, châtaigneraies, plantes aromatiques et même théiers : le territoire de De Cèze Cévennes cultive la diversité.
Une réserve foncière stratégique
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. “La réserve foncière agricole du territoire de De Cèze Cévennes est la deuxième réserve foncière agricole du département du Gard, avec 3 000 hectares exploitables en agriculture“, précise Olivier Martin, président de la communauté de communes et maire de Gagnières. Un potentiel important dont seuls “4 ou 5 cents hectares” sont actuellement exploités. “Il y a des parts agricoles à conquérir, à développer“, reconnaît l’élu.
Pour Olivier Martin, l’enjeu va au-delà de l’économie : « C’est une activité très importante pour l’entretien de l’espace, pour les paysages. C’est un pan important du territoire qui berce notre quotidien. » L’objectif affiché est clair : favoriser la consommation locale de ces produits agricoles de qualité.
Des productions atypiques adaptées au terroir
Le territoire attire des agriculteurs en quête de terrains spécifiques. David Macq, installé à Saint-Ambroix depuis 2017, en est l’illustration parfaite. Théiculteur, il a cherché pendant 10 à 12 ans un terrain adapté. “Le thé pousse avec 800 millimètres d’eau. Nous avons un microclimat avec les cours d’eau anciennement granitiques qui permettent d’accueillir des plantes un petit peu atypiques pour le département“, explique-t-il.
Son exploitation mêle théiers, plantes aromatiques, volailles et une main-d’œuvre pour le moins originale : des canards. « Les becs plats ont tendance à bien nettoyer le sol, et ne mangent pas le thé. Cela me permet d’avoir une main d’œuvre toute la semaine, même les jours fériés, ce qui n’est pas négligeable ! », sourit le producteur.
À Courry, Joseph Couillard perpétue une tradition ancestrale avec ses deux hectares de châtaigneraie. « Ici, c’est un pays de la châtaigne. On est à la limite de l’Ardèche, dans les Cévennes, une zone propice à la culture du châtaignier », explique le castanéiculteur qui consacre autant de temps à l’entretien qu’à la récolte et la transformation.
Mais il ne cache pas les difficultés : « L’agriculture est très difficile ici. On ne peut pas passer avec un tracteur, on ne peut pas ramasser avec des machines… C’est vraiment de l’agriculture vivrière et traditionnelle. »
La relève assurée par transmission familiale
Au Domaine des Bragalous à Saint-Sauveur-de-Cruzières, Amélie Jeune incarne cette nouvelle génération qui fait évoluer l’exploitation familiale. Vigneronne depuis 2023, elle travaille avec sa sœur dans une “transmission de génération en génération“. Après des études d’œnologie à Montpellier et des expériences en Amérique du Sud et en Australie, elle est revenue avec “une certaine remise en question“.
“Mon papa était en cave coopérative. Nous, nous avons développé la partie vinification sur place“, détaille-t-elle. Sa sœur a quant à elle développé le moulinage de l’huile d’olive, auparavant confié à des prestataires. Une diversification qui témoigne du dynamisme entrepreneurial local.
À Courry, Thierry Vasseur, producteur de fromage de chèvre installé depuis 2003, poursuit lui aussi l’œuvre familiale. “Mes parents se sont installés dans les débuts des années 70 et j’ai repris l’exploitation. Je pense que mon fils va reprendre derrière moi“, confie le berger qui élève une trentaine de chèvres. “Ce qui me plaît dans ce métier, c’est d’être dans la nature, puis toute la fabrication de fromage“, ajoute-t-il, même si travailler en terrain “escarpé” reste “un peu plus compliqué”.
Les journées immersives, vitrine du territoire
Face à ces réalités, la communauté de communes a développé un outil de valorisation original : les journées immersives chez les agriculteurs. Le principe ? Permettre au public de “vivre le quotidien d’un agriculteur en découvrant son activité quotidienne, son savoir-faire, en dégustant ses produits“, résume Olivier Martin.
David Macq détaille le déroulement type : “Le matin, c’est la visite du parc. L’après-midi, on fait une récolte, une transformation et le midi, on mange les produits de la ferme. Cela permet de rentrer dans le métier de l’agriculteur.” Pour lui, l’objectif est de montrer “qu’on n’est pas forcément avec des bottes toute la journée sur son tracteur. On a des temps de vie sur la ferme qui sont différents.”
Axelle Ciofolo, paysanne cueilleuse à Saint-Brès, reconvertie depuis sept ans en permaculture, voit dans ces journées un prolongement naturel de son activité. “Mes clients me demandent de venir cueillir avec moi, toucher du métier du doigt pour se recentrer, parce que je travaille dans la nature, dans un jardin, à l’approche des insectes, des oiseaux. C’est la tendance du moment“, observe-t-elle. Elle cultive des plantes médicinales et aromatiques pour en faire “des tisanes, des confitures, des bouquets de fleurs séchées“.
Un accompagnement apprécié des producteurs
Au-delà des journées immersives, la collectivité a édité un catalogue des producteurs, désormais dans sa deuxième année.
Amélie Jeune souligne l’accompagnement global : « La Communauté de communes nous aide dans le projet et sur les différents événements. Ils essaient d’être en communication avec les agriculteurs pour mettre en avant leur métier et les rendre plus visibles aux yeux des habitants locaux, mais également des touristes. » La vigneronne apprécie particulièrement les efforts pour « favoriser les circuits courts et créer un lien entre les agriculteurs ».
Joseph Couillard confirme : « La communauté de communes a fait beaucoup d’efforts ces deux dernières années pour essayer de développer les petits agriculteurs locaux, pour nous donner plus de visibilité. Elle a fait tout un travail de publication, de mise en place de journées en immersion et de communication. »
Redonner confiance au monde agricole
Pour Olivier Martin, ces initiatives dépassent la simple promotion touristique. « C’est redonner confiance et un lien avec le monde agricole qui est un peu aujourd’hui en souffrance et un peu dans l’expectative par rapport aux pouvoirs publics, par rapport aux collectivités locales », analyse le président. Dans un contexte national tendu pour le secteur, ces actions locales incarnent une forme de reconnaissance concrète du rôle des agriculteurs dans la vie du territoire.
Entre pentes cévenoles et vallées, l’agriculture de De Cèze Cévennes assume sa singularité : petites surfaces, productions de niche, travail manuel. Mais c’est précisément cette authenticité que la collectivité entend valoriser, en tissant des liens directs entre producteurs et consommateurs. Une stratégie de territoire qui mise sur la qualité et la proximité plutôt que sur les volumes.
                        
                        








































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