Engagée pour la défense d’une université publique au service de la jeunesse, de la recherche et de l’innovation, l’Université de Montpellier Paul Valéry s’est engagée au côté de l’action initiée par France Universités visant à alerter le gouvernement et la représentation nationale sur la situation financière des universités en danger. Interview de Anne Fraïsse la Présidente.
« Dans la période de crises et de transitions brutales et complexes que vit le monde contemporain, il est attendu des pouvoirs publics qu’ils misent sur leurs universités françaises, piliers de la construction et de la transmission du savoir, moteurs de la recherche et de l’innovation. Si de nombreux pays surinvestissent sur la recherche et les universités, en France au contraire les universités sont au bord de la rupture. Alors que leurs activités de recherche nourrissent le progrès de nos sociétés, et qu’elles forment chaque année des générations de citoyennes et citoyens éclairés, ainsi que l’ensemble des professionnels dont le pays a cruellement besoin, avocats, ingénieurs, psychologues, professionnels de santé, enseignants, chercheurs….l’avenir de nos universités est aujourd’hui compromis par un désengagement budgétaire inédit de la part de l’État.» indique la Présidente.
Une situation intenable
Depuis l’année 2022 et la crise internationale qui a entrainé l’explosion des coûts de l’énergie et la crise inflationniste, les universités font face à des situations budgétaires de plus en plus tendues.
En responsabilité, les établissements ont participé par diverses mesures d’économie aux efforts que requiert la situation financière du pays.
À l’Université Paul-Valéry, le budget annuel était l’an dernier de 120 millions d’€ avec un déficit de 6 millions d’€.
Cependant, diverses mesures salariales non compensées par l’État (augmentations du point d’indice dites « Guérini », augmentation des cotisations de pension civile « CAS pension ») s’ajoutent à ces difficultés et entrainent désormais une augmentation de moins en moins soutenable de la masse salariale.
Au niveau national ce sont ainsi plus de 400 M€ qui manqueront aux universités pour boucler leur budget.
Sur l’Université Paul-Valéry, avec ces mesures salariales non compensées, près de 9 M€ supplémentaires manqueront pour le paiement des salaires des fonctionnaires, entrainant un déficit équivalent.
Un appel à la responsabilité de l’État
« Si des mesures immédiates ne sont pas prises, plusieurs établissements risquent la cessation de paiement dès 2025, avec l’impossibilité de couvrir les salaires des personnels. Dans ces conditions, des décisions drastiques, telles que la réduction des capacités d’accueil et du nombre d’étudiant·es, la fermeture de filières ou la suspension d’activités de recherche sur les campus, devront être envisagées» explique Anne Fraïsse.
De telles mesures, prises sous la contrainte, auraient un impact considérable pour le pays prévient France Universités.
– La forte dégradation des conditions d’enseignement et d’apprentissage
– Le déclassement de la France en matière de recherche et d’innovation
– Les pertes économiques liées à l’arrêt ou au ralentissement de projets clés dans des domaines stratégiques (quantique, spatial…)
– Un manque de professionnels pour assurer ses services essentiels à la nation (santé, justice, enseignement…).
Pour l’université Paul Valery, le manque de financement correspondrait ainsi à une année blanche de recrutement dans certaines filières.
« Une telle situation est inacceptable. » s’élève la Présidente.
Une solution existe !
Les universités refusent que la jeunesse fasse les frais de la situation via la mise en place de frais d’inscription à la hausse et différenciés.
Les universités refusent que la recherche soit mise en pause par manque de moyens, au risque de mettre en péril les futures innovations et les performances économiques du pays.
Les universités refusent l’argument avancé concernant leurs trésoreries et la mise en avant de chiffres trompeurs : la trésorerie des universités est majoritairement gagée sur des projets de recherche, régionaux, nationaux, européens, pour lesquels elles doivent rendre compte des dépenses éligibles, ou sur projets d’investissements immobiliers indispensables pour assurer des conditions d’accueil correctes pour la formation et la recherche.
Les universités rappellent que les fonds d’investissement ne sont pas destinés à éponger les dettes imposées mécaniquement par l’État ; elles refusent de faire de la cavalerie sur leur trésorerie gagée.
Les universités défendent une proposition de sortie de crise réaliste et raisonnable : un amendement voté par l’Assemblée nationale propose de réorienter 0,5% du Crédit Impôt Recherche (CIR) – soit environ 400 millions d’euros – vers les universités.
Cette mesure est ciblée, neutre pour les finances publiques, et par ailleurs, sans remettre en cause le dispositif, est recommandée par l’Inspection Générale des Finances.
Elle offrirait une issue durable et cohérente : il ne peut pas y avoir à terme de recherche et de développement dans les entreprises sans l’amorçage de la recherche fondamentale portée au long cours par les universités.
L’Université Paul-Valéry appelle donc les décideurs politiques à agir
« Soutenir les universités, c’est investir sur la jeunesse et les talents, c’est faire le pari de l’excellence et de l’avenir, c’est investir pour le futur économique, social et culturel de la France. Pour garantir l’avenir du pays, l’État doit garantir aux universités les moyens nécessaires pour qu’elles remplissent leurs missions de formation, de recherche et d’innovation. Ne perdons pas le rôle et le sens du Service publique qui fait encore la richesse de la France. » conclut la Présidente Anne Fraïsse.